Prix Ulysse à l’ensemble de l’œuvre

Dany Laferrière

Écrivain et réalisateur, Dany Laferrière est élu en 2013 à l’Académie française. Il écrit comme il vit. 

Une vie animée par le souvenir d’une enfance heureuse avec sa grand-mère Da, à Petit-Goâve, et par ces poètes et peintres qui ont illuminé son adolescence dans un Port-au-Prince survolté. À l’été 1976, il débarque à Montréal, fuyant la dictature des Duvalier suite à l’assassinat de son collègue, ami et journaliste, Gasner Raymond. Il observe cette ville en pleine effervescence olympique, à la veille des élections historiques qui amèneront l’équipe de René Lévesque au pouvoir pour changer à jamais le paysage politique du Québec. C’est un homme libre de 23 ans qui s’engage dans cette nouvelle vie, tout en luttant pour échapper à la nostalgie, à la solitude et à la misère, enchaînant pendant huit ans des emplois précaires et s'acclimatant difficilement à l’hiver. Il loge dans des chambres “crasseuses et lumineuses”, mange peu, préférant s’acheter une vieille Remington 22 pour écrire, et des livres usagés qu’il lira dans sa “baignoire rose” avec une “bonne bouteille de mauvais vin”. Il publie, en 1985, son premier roman, Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer et devient, dès lors, une personnalité publique influente, transformant cet exil douloureux en un lumineux voyage. Celui que ses lecteurs surnomment désormais Immortel, écrivain japonais, Coeur-nomade ou Vieux-Os, a publié 36 livres, dont une trilogie illustrée pour les enfants et cinq ouvrages entièrement écrits et dessinés à la main. Cette Autobiographie américaine est complétée par la réalisation de son film, Comment conquérir l’Amérique en une nuit. S’il partage aujourd’hui son temps entre Montréal où il est devenu écrivain, Paris, où il siège chaque jeudi à l’Académie française, et le monde qu’il traverse en sifflotant avec, en poche, Borges, son écrivain préféré, et vingt-six lettres de l’alphabet, il fera entre-temps un long détour par Miami afin d’échapper à cette célébrité incompatible avec le silence intérieur qu’exige le travail d'écrivain, et sera sur place quand le séisme frappe Haïti en 2010 faisant 300 000 morts et autant de blessés. S'il ne faut pas confondre le narrateur avec l'auteur, prévient-il, ces paysages, sensations et émotions inspirent ses romans à saveur autobiographique. Lauréat, notamment, du Prix Médicis pour L’énigme du retour, récipiendaire de sept doctorats honoris causa, Laferrière est également décoré de la Légion d’honneur au grade de Commandeur, de l’Ordre des Arts et des Lettres (en France, et au Québec), de l’Ordre de la Pléiade, de l’Ordre national du Québec, de l’Ordre du Canada, de l'Ordre de Montréal, de l’Ordre du Mérite Culturel de Monaco. Chaque distinction témoigne de la puissance de son œuvre et de son rayonnement exceptionnel à l’international. Traduite mondialement, et adaptée notamment au cinéma, son œuvre inspire de nombreux espaces à vocation culturelle. Une sculpture monumentale à son effigie nommée L’exil vaut le voyage est installée dans le jardin de la Bibliothèque nationale du Québec, et sa statue de cire, au Musée Grévin Paris, le représente en posture de lecteur avec un livre qui change chaque mois.