Le Prix Ulysse est un prix littéraire créé en 2001. Ce prix annuel est décerné à l'occasion du festival Arte Mare, à un jeune auteur, pour son premier roman méditerranéen.
Lorsque les écrivains sont récompensés pour leur premier roman, on les félicite, on les envie même. Entre travail acharné et mystère de la création artistique, on ignore bien souvent quel a été le chemin. Les mois ou les années à penser à un texte, les efforts de l'écriture, de la réécriture. La peur de se confronter à la publication, à l'avis des lecteurs. La peur d'écrire autre chose. Après. Mais voici venu le moment de la remise du prix. Laissons les savourer l'instant...
Des îles et des chiens, les éditions IN8 de Sylvia Cagninacci
C’est l’histoire d’un accident. Sur le chemin du col Saint-Jean, le petit Dominique s’aventure. Il a besoin d’air, de hauteur. Au loin, la mer. En contrebas, un village corse.
Cum’è lumera à l’ombra ch’un s’accordanu mai
Un ci hè amore umanu ch’unsia fattu di guai
Amour, violence, tendresse, regrets, voici en effet un roman très noir et cependant rayonnant : Un enfant courageux se débat entre des parents qui se déchirent avec passion, et il démonte pour nous les rouages de cette infernale machine.
La vie de village est rendue dans un style parfait, et c’est avec brio que l’auteur fait monter insidieusement l’inquiétude.
Cela finira mal… Mais dans ce pays, les morts savent se manifester aux vivants et savent même leur pardonner.
Sylvia Cagninacci
Née à Paris en 1959, Sylvia Cagninacci suit des études de lettres avant de travailler dans une agence de communication éditoriale.
Elle la quitte en 2014 pour se consacrer à des travaux plus personnels, puis décide s’installer en Corse, dans le village où reposent ses parents et leurs parents avant eux. Elle a collaboré à une exposition de photos sur les maisons d’Américains (musée de Corte, 2017), déclinée avec Jean-André Bertozzi dans le livre Palais de mémoire (Albiana, 2019) puis à un film sur les femmes issues de l’émigration marocaine (musée de Bastia, 2018)
Sylvia Cagninacci habite en Corse, et c’est là qu’elle situe cette tragédie familiale contemporaine.
Furies, Actes Sud de Julie Ruocco
Il s’agit d’un roman sur le désastre Syrien, du lumineux printemps arabe à l’avènement de l'État islamique, roman étincelant et poignant autant par le style, la maîtrise du sujet, que par la précision de la documentation. Julie Ruocco se donne la possibilité d’un récit sur ces évènements qui nous ont si peu bouleversés, elle veut nous raconter une histoire en donnant chair et voix au squelette d’une actualité qui nous paraît si lointaine et se démarquer d’un récit philosophique.
Dans cette mécanique historique, elle fait se croiser les destins de deux « terrassiers complémentaires», une archéologue française trafiquante d’antiquités et un pompier Syrien devenu fossoyeur, une façon de mettre face à face l’Occident et la Syrie, et deux réalités tellement différentes. Après la défaite, reste le courage anonyme. Bérénice et Asim deviendront passeurs de mémoire. Ce livre est un manifeste pour le devoir de mémoire des victimes et contre l’impunité des bourreaux ordinaires : « Sans justice et sans mémoire, nous nous condamnons éternellement à être victimes puis bourreaux ». Les Furies surgissent de nouveau pour traquer les criminels de guerre. C’est aussi un superbe hommage aux femmes qui ont fait les révolutions arabes, et à Razan Zaitouneh, qui défendait les droits de l’Homme.
Julie Rocco creuse la terre ensanglantée de Syrie de sa plume magnifique, sa poésie et ses images saisissantes poussent ses lecteurs à des réflexions universelles qui les marquent profondément.
Julie Ruocco
Julie Ruocco, diplômée en Lettres et en relations internationales, a travaillé au Parlement européen pendant cinq ans. Passionnée par les cultures numériques, elle a publié un ouvrage de philosophie esthétique : Et si jouer était un art ? Notre subjectivité esthétique à l'épreuve du jeu vidéo (L'Harmattan, 2016). Furies est son premier roman écrit pendant le confinement.